Face aux besoins d’adaptation, pourquoi ne pas combiner APC et PSE ?

1er juin 2020

 

Dans le contexte de crise actuel, toutes les entreprises ou presque se posent la question de leur adaptation. Pour certaines, c’est un enjeu de survie. La question de la réduction de la masse salariale et de la façon dont elles vont adapter leurs effectifs, au-delà de la période de chômage partiel qui a permis de passer les premières semaines de crise, devient donc cruciale.

Depuis quelques années, les dispositifs d’adaptation des effectifs se sont multipliés, sur la base notamment d’accords collectifs, et ont été largement utilisés par les entreprises : RCC, APC, GEPP, PSE et PDV[1]….Aujourd’hui, devant l’ampleur de la crise et des adaptations à mener alors que les prévisions d’activité à moyen terme sont très incertaines, beaucoup d’entreprises se posent la question d’utiliser ces dispositifs de façon combinée pour satisfaire  au mieux leurs besoins qui se résument souvent à la nécessité d’aligner rapidement leurs organisations sur le volume d’activité (mais quel volume dans 6 mois, dans un an ?), tout en préservant les compétences dont elles auront besoin pour le rebond.

Se pose donc notamment la question de peut-on, et si oui, comment articuler les Accords de Performance Collective (APC[2]) et les Plans de Sauvegarde de l’Emploi (PSE) pour :

  • (i) maintenir et sécuriser certaines catégories d’emploi, tout en trouvant à très court terme des manières d’alléger sa charge économique.
  • (ii) dans le même temps, réduire le nombre d’emplois dans d’autres catégories, pour tenir compte de la baisse du niveau de charge prévisionnel.

Juridiquement, il semble que la cohabitation au sein d’une même entité juridique soit possible, sous réserve que les catégories de population concernées soient bien délimitées et distinctes, mais nous manquons encore de recul et de jurisprudence sur le sujet.

En tout état de cause, avant de faire un choix de dispositifs, il est, de notre expérience, impératif de considérer les éléments suivants :

  • La situation économique de l’entreprise et la clarté des objectifs poursuivis, exercice difficile dans le contexte actuel, mais essentiel pour convaincre le corps social de la nécessité des mesures proposées alors que des mesures de soutien importantes ont été déployées par le gouvernement,
  • L’évaluation de la faisabilité sociale d’un accord majoritaire, compte tenu des antécédents de l’entreprise, la signature d’un accord majoritaire étant requise pour l’APC, la RCC et la GEPP, mais non bloquante pour les PSE et PDV.
  • Une réflexion approfondie sur les besoins à court moyen et long terme :

    • L’APC constitue un levier pour gagner en compétitivité. Il s’agit d’un accord signé pour une période transitoire, qui prévoit généralement des indicateurs clé de réalisation (un chiffre d’affaires cible, un objectif atteint de seuil de rentabilité…), des mesures de retour à meilleure fortune et de compensation, ainsi qu’un engagement de maintien de l’emploi. Son objectif premier n’est pas la suppression d’emplois, mais leur adaptation provisoire, même si son application peut conduire à des départs de salariés qui refuseraient les modifications de contrat de travail proposées.
    • Les PSE/PDV/RCC/GEPP ont pour objectif de supprimer ou de transformer des emplois à court, moyen/long terme, avec des mesures d’accompagnement social et des coûts associés.
  • La maîtrise de la communication, étant donné que le lancement simultané de négociations pourrait être interprété par les syndicats comme un « chantage à l’emploi » (de type :  si l’APC n’aboutit pas à un accord, l’entreprise se verra contrainte d’alourdir le nombre d’emplois du PSE), et parce que les objectifs en termes de suppression d’emplois sont fonction des conditions négociées dans l’APC…, d’où un exercice difficile d’explication sur ces « vases communicants ».
  • Une préparation détaillée de la négociation et des différents leviers pour aboutir à un accord (touchant par exemple, dans un contexte d’APC, à l’accord de participation, la rémunération, l’organisation, le nombre d’heures travaillées etc.).
  • Et enfin, l’objectivation de la distinction entre les catégories de population concernées par l’un et l’autre des dispositifs.

Le choix de la stratégie sociale adaptée dépendra donc des objectifs poursuivis, de la capacité d’adaptation du corps social et de la force de conviction des dirigeants. A l’heure où recherche de sens et responsabilité ont été mis à l’honneur, cette période sera clé pour ainsi juger de la capacité des dirigeants et de leurs équipes RH à pouvoir traverser cette crise en faisant les bons choix.

Un des éléments de ce choix sera dicté par le degré d’urgence. L’urgence de relever à court terme les enjeux critiques de trésorerie. L’urgence d’adapter très vite des pans entiers de l’organisation de l’entreprise au niveau de charge prévisionnel. L’urgence de donner une perspective à d’autres pans de la même organisation pour réussir la transition et ne pas compromettre le rebond.

 

[1] Rupture Conventionnelle Collective (RCC), Accord de Performance Collective (APC), Congés de Mobilité prévus dans les accords de Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels (GEPP), Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE), Plan de Départ Volontaire (PDV). 

[2] Pour rappel, un Accord de Performance Collective permet, par le biais d’un accord signé avec des syndicats majoritaires, de revoir tout ou partie des conditions et de l’organisation du travail pour une durée donnée : niveau de rémunération, lieu et durée du travail, fonctionnement en équipe. De manière générale, il est associé à une promesse, si ce n’est une garantie, de maintien des emplois concernés par l’accord. L’esprit du dispositif est bien de palier une situation transitoire pour l’entreprise, dans l’attente d’une reprise de l’activité et de jours plus fastes. 

 

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